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[1648] MÉMOIRES

l’avis de l’arrêt, et qui ne m’en donna d’autre excuse que l’emportement général qu’il avoit vu dans tous les esprits. Enfin la conclusion de notre conférence fut qu’il partiroit au même moment pour Ruel ; qu’il s’opposeroit, comme il avoit déjà commencé, au projet concerté et résolu d’attaquer Paris ; et qu’il proposeroit à la Reine que M. le duc d’Orléans et lui écrivissent au parlement, et le priassent d’envoyer des députés, pour conférer et pour essayer de remédier aux nécessités de l’État.

Je suis obligé de dire pour la vérité que ce fut lui qui me proposa cet expédient, qui ne m’étoit point venu dans l’esprit. Il est vrai qu’il me charma et me toucha à un tel point, que M. le prince s’aperçut de mon transport, et qu’il me dit avec tendresse : « Que vous êtes éloigné des pensées où l’on vous croit à la cour ! Plût à Dieu que tous ces coquins de ministres eussent d’aussi bonnes intentions que vous ! »

J’avois fort assuré M. le prince que le parlement ne pouvoit qu’agréer extrêmement l’honneur que M. le duc d’Orléans et lui lui feroient de lui écrire ; mais j’avois ajouté que, vu l’aigreur des esprits, je doutois qu’il voulût conférer avec le cardinal ; que j’étois persuadé que si lui, M. le prince, pouvoit faire en sorte d’obliger la cour à ne point se faire une affaire ni une condition de la présence de ce ministre, il se donneroit à lui-même un avantage très-considérable, en ce que tout l’honneur de l’accommodement où Monsieur, à son ordinaire, ne serviroit que de figure, lui reviendroit : et en ce que l’exclusion du cardinal décréditeroit au dernier point son ministère, et seroit un préalable très-utile au coup que M. le prince