Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/276

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
274
[1649] MÉMOIRES

si le pain de Gonesse leur manquoit huit jours… » Je me le tins pour dit, et je lui repartis, beaucoup moins pour en savoir davantage que pour avoir lieu de me dégager d’avec lui, que l’entreprise de fermer les passages du pain de Gonesse pourroit recevoir des difficultes. « Quelles ? reprit-il brusquement. Les bourgeois sortiront-ils pour donner bataille ? — Elle ne seroit pas rude, monsieur, s’il n’y avoit qu’eux, lui répondis-je. — Qui sera avec eux, reprit-il ? Y serez-vous, vous qui parlez ? — Ce seroit un mauvais signe, lui répondis-je ; cela sentiroit fort la procession de la Ligue. » Il pensa un peu, et puis il me dit : « Ne raillons point ; seriez-vous assez fou pour vous embarquer avec ces gens-là ? — Je ne le suis que trop, lui répondis-je ; vous le savez, monsieur, et que je suis de plus coadjuteur de Paris, et par conséquent engagé par honneur et par intérêt à sa conservation. Je servirai toute ma vie Votre Altesse en ce qui ne regardera pas ce point. » Je vis que M. le prince s’émut à cette déclaration ; mais il se contint, et il me dit ces propres mots : « Quand vous vous engagerez dans une mauvaise affaire, je vous plaindrai ; mais je n’aurai pas sujet de me plaindre de vous. Ne vous plaignez pas aussi de moi, et rendez-moi le témoignage que vous me devez, qui est que je n’ai rien promis à Longueil et à Broussel, dont le parlement ne m’ait dispensé par sa conduite. » Il me fit ensuite beaucoup d’honnêtetés personnelles ; il m’offrit de me raccommoder avec la cour. Je l’assurai de mon obéissance et de mon zèle, en tout ce qui ne seroit pas contraire aux engagemens qu’il savoit que j’avois