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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/306

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[1649] MÉMOIRES

M. le prince de Conti. M. d’Elbœuf s’échauffa à ce mot, et il répéta ce qu’il avoit dit la veille, qu’il ne quitteroit qu’avec la vie le bâton de général. Le murmure s’éleva sur ce commencement de contestation, dans lequel M. d’Elbœuf fit voir qu’il avoit plus d’esprit que de jugement. Il ne parla pas à propos : il n’étoit plus temps de contester, il falloit plier. Mais j’ai observé que les gens foibles ne plient jamais quand ils le doivent. Nous lui donnâmes à cet instant, le troisième relais, qui fut l’apparition du maréchal de La Mothe, qui se mit au dessous de M. de Bouillon, et qui fit à la compagnie le même compliment que lui. Nous avions concerté de ne faire paroître ces personnages sur le théâtre que l’un après l’autre, parce que rien ne touche et n’émeut tant les peuples, et même les compagnies, qui tiennent beaucoup du peuple, que la variété des spectacles. Nous ne nous y trompâmes pas ; et ces trois apparitions, qui se suivirent, firent un effet sans comparaison plus prompt et plus grand qu’elles ne l’eussent fait si elles se fussent unies. M. de Bouillon, qui n’avoit pas été de ce sentiment, me l’avoua le lendemain, avant même que de sortir du Palais.

M. le premier président, qui étoit tout d’une pièce, demeura dans la pensée de se servir de cette brouillerie pour affoiblir la faction, et proposa de laisser la chose indécise jusqu’à l’après-dînée, pour donner le temps à ces messieurs de s’accommoder. Le président de Mesmes, qui étoit pour le moins aussi bien intentionné pour la cour que lui, mais qui avoit plus de vues et plus de jointures, lui répondit à l’oreille, et je l’entendis : « Vous vous moquez, monsieur ; ils