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[1649] MÉMOIRES

dent de Mesmes y fit fort valoir tout ce qu’il avoit dit en sa place à messieurs les généraux, pour les obliger à prendre la campagne avec leurs troupes. Senneterre, qui étoit le plus habile homme de la cour, ne les laissa pas long-temps dans cette erreur : il pénétra par son bon sens notre dessein. Il dit au premier président et au président de Mesmes qu’ils étoient dupés, et qu’ils s’en apercevroient au premier jour. Je dois à la vérité le témoignage d’une parole qui marque la capacité de cet homme. Le premier président, qui étoit tout d’une pièce, et qui ne voyoit jamais deux choses à la fois, s’étant écrié sur le camp de Villejuif, avec un transport de joie, que le coadjuteur n’auroit plus tant de crieurs à gage dans la salle du Palais, et le président de Mesmes ayant ajouté, Ni tant de coupe-jarrets, Senneterre repartit à l’un et à l’autre : « L’intérêt du coadjuteur n’est pas de vous tuer, messieurs, mais de vous assujétir. Le peuple lui suffïroit pour le premier : le camp lui est admirable pour le second. S’il n’est pas plus homme de bien qu’on le croit ici, nous avons pour longtemps la guerre civile. »

Le cardinal avoua dès le lendemain que Senneterre avoit vu clair : car M. le prince conçut d’une part que nos troupes, qui ne se pouvoient attaquer au poste qu’elles avoient pris, lui feroient plus de peine que si elles étoient demeurées dans la ville ; et nous commençâmes de l’autre à parler plus haut dans le parlement que nous n’avions accoutumé.

L’après-dînée du 4 mars en fournit une occasion. Les députés étant arrivés sur les quatre heures du soir à Ruel, apprirent que M. le cardinal Mazarin étoit un