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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

me la témoignoit tout entière, et je connus la main de M. et de madame de Bouillon dans le caractère de Fuensaldagne.

Nous nous assemblâmes, deux heures après l’arrivée de l’envoyé, dans la chambre de M. le prince de Conti à l’hôtel-de-ville, pour y prendre notre résolution ; et la scène fut assez curieuse. M. le prince de Conti et madame de Longueville, inspirés par M. de La Rochefoucauld, vouloient se lier presque sans restriction avec l’Espagne, parce que les mesures qu’ils avoient cru prendre avec la cour par le canal de Flamarin ayant manqué, ils se jetoient à corps perdu à l’autre extrémité. M. d’Elbœuf, qui ne cherchoit que de l’argent, taupoit à tout ce qui lui enmontroit. M. de Beaufort, persuadé par madame de Montbazon, qui le vouloit vendre cher aux Espagnols, faisoit du scrupule de s’engager par un traité signé avec les ennemis de l’État. Le maréchal de La Mothe déclara qu’il ne pouvoit rien résoudre sans M. de Longueville, et madame de Longueville doutoit que monsieur son mari y voulût entrer. C’étoient les mêmes personnes qui avoient conclu tout d’une voix, quinze jours auparavant, de demander à l’archiduc un plein pouvoir pour traiter avec lui.

M. de Bouillon leur dit qu’il ne pouvoit concevoir que l’on pût seulement balancer à traiter avec l’Espagne, après les pas qu’on avoit faits vers l’archiduc ; qu’il les prioit de se ressouvenir qu’ils avoient tous dit à son envoyé qu’ils n’attendoient que ce pouvoir et ses propositions pour conclure avec lui ; qu’il les envoyoit en la forme du monde la plus honnête ; qu’il faisoit marcher ses troupes sans attendre leur engagement ; qu’il mar-