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[1650] MÉMOIRES

m’a persuadé que parler trop n’est pas le défaut le plus commun des gens qui sont accoutumés aux grandes affaires. Ce qui me donna une grande inquiétude fut que je connoissois Noirmoutier pour l’homme du monde le moins secret.

Le 18 janvier, Laigues ayant pressé au dernier point Lyonne pour l’exécution, dans une conférence qu’il eut la nuit avec lui, le cardinal la résolut à midi. Il avoit fait croire la veille à M. le prince que Parain des Coutures, qui ayoit été un des syndics des rentiers, étoit caché dans une maison ; et il fit en sorte que le prince lui-même donnât aux gendarmes et aux chevau-légers du Roi les ordres qui étoient nécessaires pour le mener au bois de Vincennes, sous le prétexte de régler ce qu’il falloit pour la prison de ce misérable. Messieurs les princes vinrent au conseil : Guitaut, capitaine des gardes de la Reine, arrêta M. le prince ; Comminges, lieutenant, arrêta M. le prince de Conti ; et Cressi, enseigne, arrêta M. de Longueville. J’avois oublie de vous dire qu’après que madame de Chevreuse eut fait agréer à Monsieur qu’elle fit ses efforts auprès de la Reine pour l’obliger à prendre quelque résolution contre M. le prince, il lui demanda pour préalable que je m’engageasse par écrit à le servir ; et qu’aussitôt qu’il eut mon billet il le porta à la Reine, croyant lui avoir rendu un très-signalé service.

Aussitôt que M. le prince fut arrêté, M. de Boutteville, qui est à présent M. de Luxembourg, passa sur le pont Notre-Dame à toute bride, en criant au peuple que l’on venoit d’arrêter M. de Beaufort. On prit les armes, que je fis poser un moment après, en mar-