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[1650] MÉMOIRES

original entre les mains de Câumartin, qui, étant un jour avec moi à Joigny il y a huit ou dix ans, le trouva abandonné dans une vieille armoire de garde-robe. Ce qu’il y eut en cela de plaisant dans cette conférence fut que, de concert avec la palatine, je leur fis le fin des intentions de Monsieur : ce qui étoit la grosse corde, qu’on ne devoit toucher que la dernière ; et qu’eux pareillement, par le même concert, me firent aussi les fins de ce qu’ils en savoient d’ailleurs. La différence est qu’elle vouloit bien que je visse le dessous des cartes, parce qu’elle voyoit que je ne gâterois rien au jeu, et qu’elle le leur cachoit par la raison que je vais expliquer.

Monsieur, ne se résolvoit jamais que très-difficilement aux moyens quoiqu’il fût résolu à la fin. Ce défaut est une des sources les plus empoisonnées des fausses démarches des hommes. Il vouloit la liberté de messieurs les princes, mais il y avoit des momens qu’il la vouloit par la cour. Cela ne se pouvoit pas car si la cour y eût donné, son premier soin eût été d’en exclure Monsieur, ou du moins de ne l’y admettre qu’après coup, et comme une représentation. Il le jugeoit très-bien, mais il étoit foible il se laissoit aller quelquefois à M. le maréchal de Gramont, qui, d’autre part, se laissoit amuser du soir au matin par Mazarin.

Je m’aperçus bientôt de l’effet des longues conversations du maréchal de Gramont mais comme il me sembloit que j’en effacerois toujours les impressions par une ou deux paroles, je n’y faisois pas beaucoup de réflexion, ne pouvant m’imaginer que Monsieur, qui m’avoit témoigné des appréhensions mortelles du