Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/337

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qui me faisoit parler, qu’il alla chercher dans l’appréhension qu’il s’imagina que j’avois qu’il ne s’accommodât lui-même avec M. le prince. Et il me dit qu’il prendroit si bien ses mesures du côté de Saint-Maur, que je ne devois pas craindre qu’il tombât dans l’inconvénient que je lui marquois ; et que si la Reine l’avoit gagné de la main une fois, il le lui sauroit bien rendre. « Je ne suis pas si sot qu’elle croit, ajouta-t-il et je songe plus à vos intérêts que vous n’y songez vous-même. » Je confesse que je n’entendis point ce que signifioit en cet endroit cette dernière parole ; mais je m’en doutai aussitôt après, car il ajouta « M. le prince, quoique enragé contre vous, vous a-t-il nommé dans la lettre qu’il a écrite au parlement ? » Je m’imaginai que Monsieur vouloit me faire valoir ce silence, et me le montrer comme une marque du ménagement que l’on avoit pour moi à sa considération, et des précautions qu’il prendroit de ce côté-là sur mon sujet, en cas de besoin. Je jugeai de ce discours, et de plusieurs autres qui le précédèrent et qui ensuivirent, que la persuasion où je le voyois que la Reine et M. le prince étoient ou accommodés ou du moins sur le point de s’accommoder étoit ce qui l’avoit obligé de me commander d’en faire presser la Reine en son nom, et de témoigner à elle-même qu’il ne se sentiroit pas désobligé de son accommodement, et de tirer mérite auprès de M. le prince du conseil qu’il en donnoit à la Reine. Je fus tout-à-fait confirmé dans mon soupçon par une conversation de plus d’une heure qu’il eut, un moment après que je l’eus quitté, avec Charai, qui étoit serviteur particulier de M. le prince, comme je vous