Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/342

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

auroit reçu sur son sujet quelque nouvelle qui lui donnoit de la joie et qui lui faisoit de la peine. Ses paroles ne démentirent pas sa contenance : il voulut douter de ce que je lui disois, quoiqu’il n’en doutât pas. C’est le premier mouvement des gens qui sont de cette humeur, et qui se trouvent dans cet état. Il passa aussitôt après au second, qui est de chercher à se justifier de la précipitation qui les a jetés dans l’embarras. « Il est bien temps, me dit-il tout d’un coup ! La Reine fait des choses qui obligent les gens… » Il s’arrêta à ce mot, de honte, à mon avis, de m’avouer ce qu’il avoit fait. Il pirouetta quelque temps, il siffla, il alla rêver un moment auprès de la cheminée ; puis il me dit « Que diable direz-vous à la Reine ? Elle voudra que je lui promette de ne pas pousser les ministraux ; et comment puis-je le promettre après ce que j’ai promis à M. le prince ? » Il me fit en cet endroit un galimatias parfait, pour me justifier ce qu’il avoit fait dire à M. le prince depuis vingt-quatre heures ; et je connus que ce galimatias n’alloit principalement qu’à me faire croire qu’il croyoit ne m’en avoir pas fait le fin la veille. Je pris tout pour bon, et je suis encore persuadé qu’il crut avoir réussi dans son dessein. Le lieu que je lui donnai de se l’imaginer lui donna occasion de s’ouvrir beaucoup plus qu’il n’eût fait assurément s’il m’eût cru mal satisfait, et j’en tirai tout le détail de ce qu’il avoit fait. Le voici en peu de mots.

Comme il avoit posé pour fondement que M. le prince étoit, ou accommodé, ou sur le point de s’accommoder avec la cour, il crut pour certain qu’il ne hasarderoit rien en lui offrant tout dans une conjoncture où il ne craignoit pas que l’on acceptât ses offres