Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/400

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les apparences du monde, je ne devois pas être battu. Monsieur, qui trembloit de frayeur quoiqu’il fût fort à couvert dans sa maison, voulut, selon sa louable coutume, se ménager à tout événement des deux côtés. Il agréa que Ravaz, Belloy et Valois, qui étoient à lui, suivissent M. le prince ; et que le vicomte d’Autel, le marquis de La Sablonnière et celui de Genlis, qui étoient aussi ses domestiques, vinssent avec moi. On eut tout le dimanche, de part et d’autre, pour se préparer.

Le lundi 21 août, tous les serviteurs de M. le prince se trouvèrent à sept heures du matin chez lui et mes amis se trouvèrent chez moi entre cinq et six. Il arriva, comme je montois en carrosse, une bagatelle qui ne mérite de vous être rapportée que parce qu’il est bon d’égayer quelquefois le sérieux par le ridicule. Le marquis de Rouillac, fameux par son extravagance, qui étoit accompagnée de beaucoup de valeur, se vint offrir à moi. Le marquis de Canillac, homme de même caractère, y vint dans le même moment. Dès qu’il eut vu Rouillac, il me fit une grande révérence mais en arrière, et en me disant : « Je venois, monsieur, pour vous assurer de mes services : mais il n’est pas juste que les deux plus grands fous du royaume soient du même parti. Je m’en vais à l’hôtel de Condé. » Et vous remarquerez, s’il vous plaît, qu’il y alla. J’arrivai au Palais un quart-d’heure avant M. le prince, qui y vint extrêmement accompagné. Je crois toutefois qu’il n’avoit pas tant de gens que moi ; mais il avoit, sans comparaison, plus de gens de qualité, comme il étoit et naturel et juste. Je n’avois pas voulu que ceux qui