Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/429

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Monsieur haïssoit Chavigny plus que le démon : et le seul principe de toute sa conduite ne fut que sa timidité, qui cherchoit toujours à se rassurer par des ménagemens même ridicules avec tous les partis. Mais, avant que d’entrer plus avant dans le détail de ce récit, je crois qu’il est à propos de vous rendre compte d’un détail assez curieux qui concerne M. de Chavigny, que vous avez déjà vu et que vous verrez au moins encore pour quelque temps sur le théâtre.

Je crois que je vous ai dit que Monsieur avoit été sur le point de demander son éloignement à la Reine un peu après le changement du jeudi saint ; et qu’il ne changea de sentiment que sur ce que je lui représentai qu’il étoit de son intérêt de laisser dans le conseil un homme qui étoit aussi capable que celui-là d’éveiller et de nourrir la division et la défiance entre ceux de la conduite desquels Son Altesse Royale n’étoit pas contente. Il se trouva par l’événement que ma vue n’avoit pas été fausse ; l’attachement qu’il avoit avec M. le prince contribua beaucoup à rendre toutes les démarches de son parti suspectes à la Reine, parce qu’elle ne pouvoit ignorer la haine envenimée que Chavigny avoit contre le cardinal. Elle savoit, à n’en pouvoir douter, qu’il avoit été l’instigateur principal de l’expulsion des trois sous-ministres. Le ressentiment qu’elle en eut l’obligea de lui commander de se retirer chez lui en Touraine trois ou quatre jours après son expulsion. Il s’en excusa, sous prétexte de la maladie de sa mère ; il s’en défendit par l’autorité de M. le prince. Quand M. le prince n’en eut plus assez dans Paris pour le maintenir, la Reine se fit un plaisir de l’y voir sans emploi ; et elle me dit, avec une aigreur