Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/462

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même, et de plus l’homme du monde le plus changeant de son naturel. Il y avoit déjà quelque temps que mademoiselle de Chevreuse m’avoit averti qu’il disoit tous les jours à madame sa mère qu’il falloit finir, que tout étoit en confusion, que nous ne savions plus où nous allions. Bertet, qui étoit vif, pénétrant et insolent, s’étant aperçu du foible, en prit le défaut habilement : il menaça, il promit ; enfin il engagea madame de Chevreuse à lui promettre qu’elle ne seroit contraire en rien au retour de M. le cardinal ; et qu’en cas qu’elle ne me pût gagner sur cet article, elle feroit tous ses efforts pour empêcher que M. de Noirmoutier, qui étoit gouverneur de Charleville et du Mont-Olympe ne demeurât dans mes intérêts, quoiqu’il tînt ces deux places de moi. Noirmoutier se laissa corrompre par elle, sous des espérances qu’elle lui donna de la part de la cour ; et quand je le voulus obliger à offrir son service à Monsieur lorsque le cardinal entra avec ses troupes dans le royaume, il me déclara qu’il étoit au Roi ; qu’en tout ce qui me seroit personnel il passeroit toujours par dessus toutes sortes de considérations ; mais que dans la conjoncture présente, où il s’agissoit d’un démêlé de Monsieur avec la cour, il ne pouvoit manquer à son devoir. Vous pouvez juger du ressentiment que j’eus de cette action. J’éclatai contre lui avec fureur, et au point que quoique j’allasse tous les jours chez mademoiselle de Chevreuse, qui se déclara ouvertement contre madame sa mère en cette occasion, je ne saluois ni lui ni Laigues, et je ne parlois presque pas à madame de Chevreuse. Je reprends la suite de mon discours.