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let. Le mari étoit accoutumé à cette manière de trafic, et il n’avoit pas été inutile à la liberté de M. de Beaufort. Il est mort, lui et toute sa famille ; et j’en parle par cette considération plus librement. Comme tout ce qui est écrit peut être vu par des accidens imprévus, permettez-moi de ne point entrer dans le détail de tous les autres commerces que j’eus après celui-là, et dans lesquels il faudroit nommer des gens qui vivent encore. Il suffit que je vous dise que nonobstant le changement de trois exempts et de vingt-quatre gardes du corps qui se succédèrent pendant le cours de quinze mois les uns aux autres, mon commerce ne fut jamais interrompu.

Madame de Pommereux et messieurs de Caumartin et d’Hacqueville m’écrivoient réglément deux fois la semaine. Voici les différentes matières de ce commerce : elles tendoient toutes à ma liberté ; la voie la plus courte étoit celle de se sauver de prison. Je fis deux entreprises, dont l’une me fut suggérée par mon médecin qui étoit homme de mathématiques. Il eut la pensée de limer la barre qui étoit à la grille d’une petite fenêtre qui étoit dans la chapelle où j’entendois la messe, et d’y attacher une espèce de machine avec laquelle je fusse à la vérité descendu assez facilement du troisième étage du donjon ; mais comme ce n’eût été que la moitié du chemin fait, et qu’il eût fallu remonter l’enceinte, de laquelle d’ailleurs l’on n’auroit pu redescendre, il quitta cette pensée, qui étoit en effet impraticable ; et nous nous réduisîmes à une autre, qui ne manqua que parce qu’il ne plut pas à la Providence de la faire réussir. J’avois remarqué, dans le temps qu’on me menoit sur la tour,