Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/265

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que le maréchal étoit de concert avec moi. Deux petits pages qui se baignoient, et qui me voyant suspendu à la corde, crièrent que je me sauvois, ne furent pas écoutés, parce que tout le monde s’imagina qu’ils appeloient les gens au secours du jacobin qui se baignoit. Mes quatre gentilshommes se trouvent à point nommé au bas du ravelin où ils avoient fait semblant de faire abreuver leurs chevaux : je fus à cheval moi-même avant qu’il y eût eu seulement la moindre alarme ; et comme j’avois quarante relais posés entre Nantes et Paris, je serois arrivé infailliblement le mardi à la pointe du jour, sans un accident que je puis dire avoir été le fatal et le décisif du reste de ma vie. Je vous en rendrai compte, après que je vous aurai parlé d’une circonstance importante.

J’avois un chiffre avec madame la palatine : nous l’appelions l’indéchiffrable parce qu’il nous avoit toujours paru qu’on ne le pouvoit pénétrer qu’en sachant le mot dont on seroit convenu. Ce fut par ce chiffre que j’écrivis à M. le président que je me sauverois le 8 d’août ; ce fut par ce chiffre qu’il me manda que je me sauvasse à toute risque ; ce fut par ce chiffre que je donnai les ordres nécessaires pour régler et pour placer mes relais ; ce fut par ce chiffre que nous convînmes, Annery, Laillevaux, et moi, du lieu où la noblesse du Vexin me devoit joindre pour entrer avec moi à Paris. M. le prince, qui avoit un des meilleurs déchiffreurs du monde qui, si je m’en souviens, s’appeloit Martin, me tint ce chiffre six semaines à Bruxelles et il me le rendit, en m’avouant que cet homme lui avoit confessé qu’il étoit indéchiffrable. Voilà de grandes preuves pour la qualité d’un