Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/295

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Je crains bien que toutes ces confessions, que la seule peur produit, ne vaillent rien. » Il demeura toujours à donner ses ordres avec un froid admirable ; et en donnant du courage, mais doucement et honnêtement, à un vieux soldat des terces de Naples qui faisoit paroître un peu d’étonnement. Je me souviens toujours qu’il l’appela sennor soldado de Carlos Quinto.

Le capitaine particulier de la galère se fit apporter au plus fort du danger, ses manches en broderie et son écharpe rouge, en disant qu’un véritable Espagnol devoit mourir avec la marque de son roi. Il se mit dans un grand fauteuil, et il donna un grand coup de pied dans la mâchoire à un pauvre Napolitain qui, ne pouvant se tenir sur le coursier, marchoit à quatre pattes en criant : Sennor don Fernando, por l’amor de Dios confession. Le capitaine, en le frappant, lui dit : Enemigo de Dios, piedes confession. Et, comme je lui représentois que la preuve n’étoit pas bonne, il me répondit que ce vieillard scandalisoit toute la galère. Vous ne pouvez vous imaginer l’horreur d’une grande tempête : vous en pouvez imaginer aussi peu le ridicule. Un observantin sicilien prêchoit au pied de l’arbre du mât que saint François lui avoit apparu, et l’avoit assuré que nous ne péririons pas. Ce ne seroit jamais fait si j’entreprenois de vous décrire les frayeurs et les impertinences que l’on voit en ces rencontres.

Le grand péril ne dura que sept heures ; nous nous mîmes ensuite un peu à couvert sous la piarouse. Le temps s’adoucit, et nous gagnâmes Porto-Longone. Nous y passâmes la Toussaint et la fête des Morts, parce que le vent nous étoit contraire pour sortir du