Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/389

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

amis à mon ambition et à mon caprice. On ne parla, dans la conversation, que de la tendresse qu’on avoit pour moi, que des expédiens que l’on cherchoit avec madame de Chevreuse et avec Laigues pour me raccommoder solidement avec la cour, et que des facilités que l’on espéroit d’y trouver. La conclusion fut une instance très-grande de prendre dix mille écus, par lesquels on espéroit, dans le pressant besoin que j’avois d’argent, d’adoucir à mon égard, et de couvrir à celui du monde, le cruel tort que l’on m’avoit fait. Malclerc refusa les dix mille écus, quoique mes amis le pressassent beaucoup de les recevoir. Ils m’en écrivirent, mais avec force, et ils ne me persuadèrent pas ; et je me remercie encore de mon sentiment. Il n’y a rien de plus beau que de faire des grâces à ceux qui nous manquent ; il n’y a rien, à mon sens, de plus foible que d’en recevoir. Le christianisme, qui nous commande le premier, n’auroit pas manqué de nous enjoindre le second, s’il étoit bon. Quoique mes amis eussent été de l’avis de ne pas refuser les offres de M. de Noirmoutier, parce qu’il les avoit faites de lui-même, ils ne crurent pas qu’il fût de la bienséance d’en solliciter de nouvelles envers les autres, au moment que la bonne conduite les obligeoit à affecter même de faire des triomphes de l’exaltation de Chigi. Ils suppléèrent, de leur propre fonds, à ce qui étoit de plus pressant et de plus nécessaire ; et Malclerc vint me trouver à Rome, où je vous assure qu’il ne fut pas désavoué du refus qu’il avoit fait de recevoir l’argent de M. de Noirmoutier.

Ce que vous venez de voir de la conduite de celui-ci est l’image véritable de celle que tous ceux qui