Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/453

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Devant Bry le siège avoient mis,
Ils sortirent de notre ville,
Ayant à leur suite onze mille,
Tant cavaliers que fantassins.
Si vous demandez leurs desseins,
Les voici. L’armée ennemie,
Étant ce jour-là dans la Brie,
Ils alloient d’un autre côté ;
Et, pour dire la vérité,
Nos chefs dans ces derniers bagarres
Ne firent que jouer aux barres.
Étiez-vous devers Charenton,
Nous vous cherchions devers Meudon.
Et si des deux partis le nôtre
Rencontra quelquefois le vôtre,
Où l’on fit de petits combats,
Ce fut qu’on ne s’entendit pas :
Ce fut par malheur ou bévue
Par une rencontre imprévue,
Par quelques soldats trop vaillans,
Par des espions un peu lents.
Parfois dans quelque caracole,
Souvent contre votre parole,
Et toujours contre nos desseins,
Nous en sommes venus aux mains.
Mais pour cette fois notre armée
Ne fut jamais plus animée,
Et vous fîtes bien d’être ailleurs,
Pour éviter de grands malheurs.
Or, trêve de la raillerie,
Tandis que vous fûtes en Brie,
Nos généraux tenant les champs
Ce jour et les autres suivans,
Donnèrent temps à tout le monde
D’aller et courir à la ronde
Chercher infinité de grains
Dont nos greniers furent si pleins,
Que j’en sais plusieurs qui crevèrent
Des quantités qui s’y trouvèrent.
Les jours suivans[1], furent vendus,
Selon plusieurs arrêts rendus,
Les meubles de Son Eminence,
Qui, bien que pleine d’innocence,
Et qu’elle eût protesté d’abus,
Il n’en resta pourtant rien plus.
Le vendredi[2], l’on a nouvelle,
Qui pour nous n’est bonne ni belle,
Que le sieur comte de Grancé
Sans que nous l’eussions offensé,
Avoit mis un siége funeste
Devant Bry[3], le seul qui nous reste ;
Et qu’a l’abord le gouverneur
Nommé Bourgogne, homme d’honneur,
Avoit fait jusqu’à l’impossible
Percé l’ennemi comme un crible,
Et bien rabattu son caquet
À coups de canons et mousquet ;
Mais qu’enfin une large brèche,
Le manque de poudre et de mèche,
Et le désespoir du secours
(Qui ne pouvoit pas avoir cours,
A cause des mauvais passages,
Des défilés et marécages
Que nous ne pouvions pas gauchir,
Et que nous pouvions moins franchir,
Praslin tenant les avenues,)
Faisant sauter Bourgogne aux nues,
Il avoit fait un bon traité :
Car tel il lui fut protesté.
Mais, las ! ceux qui tenoient le siège
Se servirent du privilége
Qui permet à tous les Normands
De ne tenir point leurs sermens ;
Puisque contre la foi promise
Ils mirent tous nus en chemise
La plus grand’part de nos soldats,
Qui revinrent les chausses bas.
    Ce fut au cul[4] de la semaine
Que nos députés vers la Reine
Au parlement sont revenus,

  1. 25 février.
  2. 26 février.
  3. Siège de Brie-Comte-Robert.
  4. 27 février.