Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/501

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quelque égard pour l’autorité mourante de la république, voyons quel honneur vous reviendra de la respecter, lorsque vos ennemis la méprisent ; et si c’est un parti fort avantageux pour vous que de vous exposer à devenir leur sujet. Plût à Dieu qu’elle fût dans son premier éclat ! Personne alors ne vous dissuaderait plus fortement que moi du dessein où je vous anime présentement. Si cette république, qui n’a presque plus rien de libre que le nom, pouvoit conserver son autorité, toute languissante qu’elle est, dans l’état où nous la voyons, j’avoue « qu’il y auroit quelque raison de souffrir notre malheur avec patience ; et que s’il n’étoit ni sûr ni utile, il seroit au moins généreux de sacrifier nos propres intérêts à cette vaine image qui nous reste de sa liberté. Mais à présent que les artifices d’André Doria ont renfermé tous les conseils de la république dans sa seule tête, et que l’insolence de Jeannetin en a mis toutes les forces entre ses mains ; à cette heure que Gênes se trouve dans le période où elle doit changer, par cette fatalité secrète mais inévitable qui marque de certaines bornes à la révolution des États ; à cette heure que les esprits de ses citoyens sont trop désunis pour pouvoir vivre davantage sous le gouvernement de plusieurs ; à présent dis-je qu’on ne peut résister à la tyrannie qu’en établissant une monarchie légitime, que ferons-nous dans cette extrémité ? Tendrons-nous la gorge à ces bourreaux qui veulent joindre notre perte à celle de la liberté publique ? Le comte Jean-Louis de Fiesque verra-t-il avec patience Jeannetin Doria monter insolemment sur le trône de sa patrie, où sa fortune et son ambition le portent, sans avoir aucune qualité pour le mériter ? Non non, monsieur ; il faut que votre vertu lui dispute un avantage qui n’est dû qu’à vous seul. C’est une chose rare et souhaitable tout ensemble, de se trouver dans une occasion où l’on soit obligé comme vous l’êtes aujourd’hui par le motif du bien public et de votre gloire particulière, de vous mettre une couronne sur la tête. Ne craignez point que cette action vous donne le nom d’intéressé : au contraire, il n’y a que la crainte du danger, qui est le plus bas de tous les intérêts, qui vous puisse empêcher de l’entreprendre ; et il n’y a que la gloire qui est directe-