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MÉMOIRES

se retirer ; mais c’étoit une chose difficile, et il trouvoit encore plus de péril à se mettre mal avec les deux partis qu’à suivre le plus mauvais. Dans cette inquiétude il fut surpris de la mort à l’âge de quarante-quatre ans, et après peu de jours d’une maladie que l’on ne crut dangereuse que deux jours avant qu’il expirât.

Fabert, gouverneur de Sedan, qui étoit son ami intime, ayant su qu’il étoit prêt de s’engager avec les princes, avoit fait deux voyages exprès à Paris et à la cour incognito pour essayer de l’en détourner : ce qu’il ne put faire, non seulement parce qu’il étoit déjà trop embarqué, mais principalement parce que les mouvemens de vengeance qu’il sentoit contre le cardinal étoient trop ardens en lui. En cette occasion il lui fit voir même qu’il n’étoit pas tout-à-fait sincère ; car sachant que Fabert étoit inflexible en ce qui regardoit le service du Roi et le bien de l’État, il lui cacha plusieurs choses, et lui protesta toujours qu’il n’avoit dessein que de travailler à la paix et à la réunion de la maison royale, quoique l’on vît bien ce qu’il faisoit sous main pour fortifier les princes au désavantage de la cour.

Ayant su qu’Arnauld d’Andilly, que la dévotion avoit fait retirer à Port-Royal, et qui avoit été de tout temps son ami particulier, le blâmoit fort de ce qu’il prenoit un parti contraire au Roi, il l’alla voir ; et s’étant enfermé avec lui, il lui fit un discours de ses intentions si sincères en apparence, si généreuses et si désintéressées, que depuis ce jour-là Andilly affirmoit à tout le monde qu’il n’y avoit pas une âme meilleure, plus chrétienne ni plus française que celle de