Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 48.djvu/88

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
86
[1652] MÉMOIRES

roles, et qu’ils croyoient qu’il ne réfuseroit pas de se fier aussi à la leur. De quoi il les assura, et fut bien aise de ne se voir engagé que de parole[1], ayant à faire ce qu’il fit à trois jours de là : car le samedi 15 juin au soir, messieurs les princes ayant appris que le maréchal de Turenne s’avançoit vers le camp de Lorraine, crurent d’abord qu’il venoit l’attaquer ; et comme il y avoit quelques troupes de M. d’Orléans mêlées avec celles du duc de Lorraine, Son Altesse Royale fit partir la nuit le duc de Beaufort avec quelque cavalerie pour les aller commander. Étant arrivé au camp, il fut bien étonné d’y trouver le roi d’Angleterre et le maréchal de Turenne, qui sommoient M. de Lorraine d’exécuter le traité qu’il avoit fait avec le Roi ; à faute de quoi on alloit l’attaquer, l’armée du Roi étant en bataille, et le canon prêt à tirer. Le duc de Lorraine se tournant vers le duc de Beaufort, lui dit : « Monsieur, vous voyez comme je suis pressé ; mon intention n’est pas de hasarder mes troupes : je m’étois engagé à M. d’Orléans de faire lever le siége d’Étampes, je l’ai fait ; maintenant le Roi me rend deux places (Vic et Moyenvic), et me donne assurance de me rendre les autres quand la paix générale se fera. C’est un traité que j’avois fait avec le Roi avant que de m’engager à Son Altesse

  1. De ne se voir engagé que de parole : « Le Duc de Lorraine vivoit comme un bandit, faisant profession de n’avoir ni foi, ni loyauté, ni fidélité quelconque. » (Mémoires de Talon, tome 8, 2e partie, page 5, anc. édit.) Pavillon, dans le Testament de Charles IV, porte de ce prince le même jugement :

     
    « Il donna librement sa foi
    « Tour à tour à chaque couronne ;
    « Il se fit une étrange loi
    « De ne la garder à personne. »