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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/204

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DE l’ABBÉ DE CHOISY.

premier valet de chambre, s’en saisit, et ne le rendit pas : il en fut au moins soupçonné, parce que la veille de la mort du cardinal il le quitta agonisant, et alla tout seul au Louvre, où Colbert ne trouva rien le lendemain. Le duc Mazarin n’eut aucune connoissance du testament, ou eut assez d’esprit pour n’en rien dire : il se croyoit assez heureux d’avoir par son contrat de mariage douze cent mille écus d’argent comptant, le gouvernement général d’Alsace, avec les gouvernemens particuliers de Brisach et de Philisbourg, ceux de La Fère et de Vineennes, les terres, les maisons, les meubles et les pierreries, qui le rendirent, avec ce qu’il avoit déjà, le plus grand seigneur de France. On dit même qu’il mit la main sur les six millions qui étoient à La Fère, et sur les deux qui étoient à Brisach, où il alla peu de temps après la mort du cardinal. Le Roi lui tint aussi parole sur le gouvernement de Bretagne, que le cardinal mourant lui avoit encore demandé pour lui : il ordonna au jeune Brienne, deux heures après la mort du cardinal, d’en expédier les provisions en faveur du duc Mazarin. Brienne lui représenta qu’il falloit avoir la démission de la Reine mère, qui étoit pourvue de ce gouvernement : le Roi lui dit d’attendre un moment, et entra dans le cabinet, de la Reine mère, d’où étant sorti aussitôt, il redit à Brienne d’expédier toujours les provisions sans parler de démission, et de les porter à M. le chancelier pour les sceller. Brienne prit encore la liberté de lui dire que M. le chancelier feroit assurément difficulté sur la démission. Alors le Roi prit cet air et ce ton de maître qu’il a toujours eu depuis, et qu’il n’avoit point eu jusque là, et lui dit :