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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/222

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DE l’ABBÉ DE CHOISY.

si sérieusement mais enfin les serpens furent ôtés, et ne sont plus sur les volets ; ils sont seulement demeurés en pierres de taille aux fenêtres des galeries du Louvre, parce que pour les ôter il eût fallu faire de furieux échafauds et de la dépense, et que le peuple se seroit réjoui aux dépens de qui il appartenoit. M. de Louvois, qui savoit cette historiette, étant allé aux Invalides pendant qu’on y barbouilloit les mauvaises peintures qui y sont, se mit dans une furieuse colère contre le peintre, qui vouloit, en le peignant auprès du Roi, attraper sa ressemblance : « Non, non, lui dit-il, défigurez-moi tous ces visages où vous avez pris tant de peine, et qu’on ne reconnoisse que le visage du maître. » M. Le Brun s’est moqué de cette politique en peignant la galerie de Versailles.

Colbert se piquoit d’une grande naissance, et avoit là-dessus un furieux foible : s’il avoit tort ou raison, je m’en rapporte aux généalogistes. Il fit enlever la nuit, dans l’église des Cordeliers de Reims, une tombe de pierre où étoit l’épitaphe de son grand-père, marchand de laine demeurant à l’enseigne du Long-vêtu, en fit mettre une autre d’une vieille pierre où l’on avoit gravé en vieux langage les hauts faits du preux chevalier Colbert, originaire d’Écosse. L’archevêque de Reims m’a conté que quelque temps après la cour ayant passé à Reims, M. Colbert l’alla voir, suivi du marquis de Seignelay son fils, et des ducs de Chevreuse et de Beauvilliers ses gendres ; et qu’après une courte visite il remonta en carrosse, et dit au cocher Touche aux Cordeliers ! L’archevêque, curieux, envoya un grison voir ce qu’ils y faisoient ; et il trouva M. Colbert à genoux sur la prétendue tombe de ses