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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/242

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DE l’ABBÉ DE CHOISY.

ses conseils, et entretenoit souvent ses ministres en particulier, pour voir s’ils lui diroient les mêmes choses que lorsqu’ils étoient ensemble. Il se faisoit lire toutes les lettres des ambassadeurs, et y répondoit lui-même ; mais cela ne l’empêchoit pas de donner toutes sortes de divertissemens à sa cour. Il avoit fait agrandir le canal de Fontainebleau, et il s’y premenoit tous les jours en calèche avec Madame et quelques autres dames. La Reine étoit grosse, et s’y faisoit porter en chaise. Les courtisans étoient à cheval, et il y avoit souvent des parties de chasse l’après-dînée, et le bal le soir. On y donna le ballet des Saisons, où le Roi représentoit le Printemps, accompagné des Jeux, des Ris, de la Joie et de l’Abondance. Il y dansa avec cette grâce qui accompagnoit toutes ses actions, et cet air de maître qui, même sous le masque, le faisoit remarquer entre les courtisans les mieux faits. Le comte d’Armagnac, et le marquis de Villeroy, et Rassan, ne lui faisoient point de tort. Il étoit alors fort amoureux de mademoiselle de La Vallière, et d’autant plus touché, qu’il en faisoit encore un mystère presque impénétrable. Heureux, dans sa foiblesse, s’il avoit toujours gardé une pareille conduite, et si, par une vaine ostentation de ses plaisirs, il n’eût point donne de scandale ! Mais nous en parlerons dans son temps, et nous dirons, pour l’excuser un peu, qu’il fut dans la suite comme forcé, par la trahison du marquis de Vardes, à faire un éclat dont sa conscience souffrira jusqu’au dernier moment de sa vie.

Mademoiselle de La Vallière n’étoit pas de ces beautés toutes parfaites qu’on admire souvent sans