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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/297

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MÉMOIRES

jour en jour. Il n’épargnoit ni soin ni dépense pour faire instruire les nouveaux convertis ; il fit imprimer à ses dépens pour plus de huit cent mille francs de livres de piété et de religion, qu’il faisoit distribuer dans les provinces ; et cela dans le temps qu’il retranchoit la plupart de ses dépenses de plaisir. Il faisoit de continuelles grâces aux nouveaux convertis : il donna quarante mille livres au marquis de Vérac, pour lui aider à payer sa charge de lieutenant de roi de Poitou, que le comte de Parabère lui avoit vendu quatre-vingt mille livres. Il fit plus ; et voyant qu’il ne pourroit jamais déraciner le calvinisme du Dauphiné tant qu’il y auroit des barbets dans les vallées voisines de Pignerol, il persuada au duc de Savoie de les en chasser, ou de les obliger à se convertir. Il lui offrit même un secours de troupes que Catinat devoit commander, au cas que les édits et les raisons fussent inutiles.

Ces barbets sont des hérétiques, reste des anciens Vaudois et des Albigeois qui firent tant de désordres en France dans le treizième siècle. Voici pourquoi on les a appelés barbets. Barba dans la langue ou jargon du pays, signifie oncle : ces hérétiques expliquant à leur mode le passage de l’Évangile qui défend d’appeler aucun homme du nom de père, parce que Dieu seul est notre véritable père, crurent qu’ils ne devoient pas donner le nom de père à leurs ministres ; et ils leur donnèrent le nom de barba ou d’oncle, qui, après celui de père, leur paroissoit le plus propre à marquer leurs respects ; et du nom de barba, qu’ils donnèrent à leurs ministres, ils furent eux-mêmes nommés barbets par ironie ou par sobriquet, de la