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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/511

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MÉMOIRES

tenoient les Turcs, et la façon dont ils faisoient leur retraite. Il dépêcha dans le moment un courrier à la Reine sa femme, qu’il avoit laissée à Cracovie, et lui manda en peu de paroles le succès de son voyage, la levée du siége, et qu’il pouvoit l’assurer qu’elle ne lui reprocheroit pas ce que les femmes des Tartares ont coutume de reprocher à leurs maris, quand ils reviennent à la maison les mains vides après une expédition heureuse. Effectivement on a plutôt reproché à ce roi d’avoir eu un peu trop d’attention à mettre et à faire mettre à part pour lui tout ce qui se rencontra de riche, de curieux et d’utile dans les tentes du grand visir, qu’il trouva toutes pleines, et même d’avoir fait ramasser avec avidité ce qu’il sut que quelques particuliers avoient pris, malgré la défense qu’il avoit faite de piller.

L’armée turque étoit si considérable, que l’on sut seulement qu’elle se retiroit en bon ordre du côté de Barcan, où étoit son pont sur le Danube, qui la séparoit de la ville de Gran ; et comme il falloit quelque arrangement pour suivre avec ordre une armée si supérieure, on convint que de deux ou trois jours on ne se mettroit point en marche, tant pour donner le loisir d’arriver aux troupes qui venoient de plusieurs endroits, que pour raser les tranchées et les ouvrages des Turcs ; quelques jours même de séjour étoient nécessaires pour l’arrangement des vivres. Le lendemain donc de cette grande journée de la levée du siège, le Roi se reposa ; mais le jour d’après, sans en rien dire, ce prince, qui souhaitoit une action qui ne fût glorieuse que pour lui et pour sa nation, donna l’ordre que le lendemain matin ses quinze mille chevaux