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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/519

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MÉMOIRES

Ses hommages n’étoient pas méprisables : il étoit monté par sa valeur sur un trône qui lui appartenoit par sa naissance, et que la fortune lui disputa si long-temps. Il eut de profonds respects pour madame de Guercheville ; il voulut lui faire des présens : elle n’écouta rien, n’accepta rien ; et, pour lui ôter toute espérance, elle évita de le voir, et se priva des plaisirs de la cour pour se conserver tout entière à son honneur. « Il ne faut pas, disoit-elle, qu’une femme soit assez téméraire pour attendre son ennemi ; elle succombera en présence : qu’elle évite le combat, si elle veut être la plus forte. Il est de certaines victoires qu’on ne remporte qu’en fuyant. » Elle se confina dans ses maisons de campagne, et ne parla jamais au Roi que malgré elle, et toujours avec une fierté respectueuse qui le faisoit rentrer en lui-même. « Je ne suis peut-être pas d’assez bonne maison, lui disoit-elle un jour, pour être votre femme ; et j’ai le cœur trop noble pour être votre maîtresse[1]. »

Henri ne se rebutoit point : accoutumé à vaincre en toutes sortes de combats, la résistance de madame de Guercheville l’irritoit, et ne le guérissoit pas. Il prit des villes, il gagna des batailles ; il acquit une nouvelle gloire ; il s’en crut plus aimable : il recommença ses assiduités, et trouva les mêmes respects et la même indifférence. Elle avoit épousé en secondes noces M. de Liancourt, et n’avoit point voulu quitter le nom de son premier mari, par un scrupule peut-être trop affecté : la duchesse de Beaufort avoit

  1. Cette belle réponse a été aussi attribuée à Catherine de Rohan, duchesse de Deux-Ponts. (Voyez le Dictionnaire de Bayle, au mot Catherine de Parthenay.)