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tant d’oiseaux par les bois, ni tant d’herbes dans les champs ou sur le penchant des collines, qu’il y a chaque soir de pensers en mon cœur.

De jour en jour, j’espère désormais arriver au dernier soir qui séparera en moi les ondes du sol de la vie, et me laissera dormir sur le penchant de quelque colline, car jamais sous la Lune homme ne souffrit autant de maux que moi ; ils le savent, les bois que, seul, je vais parcourant jour et nuit.

Je n’eus jamais une nuit tranquille, mais j’allai soupirant matin et soir, depuis qu’Amour a fait de moi un habitant des bois. Avant que je puisse me reposer, on verra certainement la mer sans ondes, le Soleil recevra sa lumière de la Lune, et les fleurs d’avril mourront sur le penchant de chaque colline.

Pensif, je passe le jour à errer de colline en colline ; puis je pleure la nuit ; et je n’ai pas plus de repos que la Lune. Aussitôt que je vois le soir s’embrunir, les soupirs sortent de ma poitrine, et les ondes de mes yeux, de façon à arroser les herbes et ébranler les bois.

Les cités sont des ennemis, les bois des amis pour mes pensers que, par cette haute colline, je vais apaisant au murmure des ondes, au milieu du doux silence de la nuit ; de sorte que, tout le jour, j’attends le soir que le Soleil parte et fasse place à la Lune.

Ah ! fussé-je, avec l’amant de la Lune, endormi maintenant en quelques bois verdoyants ; et celle qui, avant vêpres a fait pour moi le soir, pût-elle venir seule avec elle et avec Amour sur cette colline, pour y rester une nuit ; et le jour pût-il s’arrêter et le Soleil rester toujours au sein des ondes !

Sur des ondes cruelles, à la lumière de la Lune,