causant de leurs douces amours et soupirant après le royaume de Soria.
Je m’approchai de ces esprits qui, se tenant à l’écart, suivaient un autre chemin, et je dis au premier : « — Je te prie de m’attendre. — »
Et lui, à mon parler latin, s’arrêta un instant, le visage courroucé ; puis, comme s’il devinait mon intention,
Il dit : « — Je suis Séleucus, et celui-ci est Antiochus, mon fils, qui soutint une grande guerre contre vous. Mais la raison ne peut rien contre la force.
« Celle-ci, après avoir été ma femme fut ensuite la sienne ; car pour l’empêcher de mourir d’amour, je la lui donnai ; et ce don fut chose licite entre nous.
« Stratonice est son nom ; et, comme tu vois, notre sort est inséparable ; c’est à ce signe qu’on voit combien notre amour est tenace et fort.
« Elle consentit à me laisser le trône ; moi, je consentis à abandonner tout mon bonheur, et lui, consentit à donner sa vie, de sorte que chacun de nous faisait plus compte des autres que de soi-même.
« Et sans la discrète assistance du noble médecin, qui s’aperçut bien de son mal, son existence aurait été terminée en sa fleur.
« Aimant en silence, il fut sur le point de mourir ; aimer fut sa force, se taire fut sa vertu. Ce fut la pitié qui me fit le secourir. — »
Il dit ainsi ; et comme un homme qui change de volonté, il hâta tellement ses pas quand il eut fini de parler, qu’à peine je pus lui rendre son salut.
Quand cette ombre se fut dérobée à mes regards, je demeurai triste, et je m’en allai soupirant ; et mon cœur ne se détacha pas de son récit,