Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/280

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d’années Rome et toute l’Italie n’ont pu le vaincre, et voici qu’une vile femme de la Pouille le captive et l’enchaîne.

« Celle qui suit son maître, les cheveux coupés courts, fut reine du Pont. Vois comme son attitude est celle d’une esclave et comme elle se dompte elle-même !

« Cette autre est Portia que le fer et le feu rendent parfaite ; cette autre est Julie ; elle se plaint de son époux qui lui préfère sa seconde femme.

« Tourne là-bas les yeux vers le grand patriarche qui ne se repent pas d’avoir été trompé, et qui ne se plaint pas d’avoir servi deux fois sept ans pour obtenir Rachel.

« Amour vivace, qui croît au milieu des souffrances ! Vois le père de celui-ci, vois son aïeul qui quitte son pays natal avec Sarah.

« Vois ensuite comment l’amour cruel et dépravé vainquit David et l’entraîna à commettre le crime qu’il pleura plus tard en un lieu obscur et profond.

« Il semble qu’un semblable nuage obscurcisse et couvre la claire renommée de son fils, réputé comme le plus sage, et le rende tout à fait différent du prince que je viens de nommer.

« Vois son autre fils qui en un même instant aime et n’aime plus ; vois Tamar qui, pleine d’indignation et de douleur, se plaint à son frère Absalon.

« Un peu en avant d’elle, vois Samson, plus fort que sage, qui dans sa sottise, repose sa tête sur le sein de son ennemie.

« Vois ici comment, au milieu des épées et des lances, grâce à l’amour et au sommeil, une jeune veuve, par son beau parler et son beau visage,