Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/337

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On verra comme on se repose sur des soins superflus, comme on travaille et comme on sue en vain, et comme se trompent les hommes.

Aucun secret ne pourra se cacher ou rester enfermé ; toute conscience, pure ou flétrie, apparaîtra nue aux yeux du monde entier.

Et quelqu’un viendra pour nous juger et nous reconnaître ; puis nous verrons chacun aller au lieu qui lui sera assigné, comme la bête qui, étant chassée, se renfonce dans le bois.

Et l’on verra que dans ces hauts parages dont vous êtes si orgueilleux, l’or et les terres ont été un dommage et non un avantage.

Et, par contre, on verra ceux qui ont toujours vécu, courbés sous le frein d’un modeste sort, sans pompe aucune, se réjouir en eux-mêmes.

Ces cinq Triomphes, nous les avons vus ici bas sur cette terre, et, Dieu le permettant, nous verrons enfin le sixième là-haut.

Nous verrons le Temps détruire toute chose aussi promptement ; et la Mort si avare de ses droits ; et l’un et l’autre seront anéantis en même temps.

Nous verrons ceux qui ont mérité une éclatante renommée et que le Temps a détruits ; et les beaux visages que le Temps et la Mort cruelle ont fait pâlir.

Revenant plus beaux que jamais, ils laisseront à la Mort impétueuse l’oubli, les aspects sombres et moroses et les jours mauvais.

Revenus à l’âge de leur plus verte floraison, ils auront, avec une beauté immortelle, une éternelle renommée ; mais au-dessus de tous ceux qui vont se refaire une nouvelle existence,