Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’heure de none ou de vesprée, soit à l’aube ou quand l’angélus sonne, ma pensée est redevenue si tranquille, que je ne me rappelle plus que cela et ne me soucie plus d’autre chose.

L’air suave, qui vient du clair visage de Laure au son de ses paroles prudentes, produit une douce clarté partout où il souffle.

Il me semble que dans cet air un gentil esprit du paradis vient sans cesse me réconforter, de sorte que mon cœur las ne respire plus ailleurs.


SONNET LXXIII.

Laure étant survenue au moment où il ne l’attendait pas, il n’ose pas lui parler.

Amour m’ayant poussé à l’endroit habituel, inquiet comme quelqu’un qui s’attend à être attaqué et qui se méfie et n’avance que prudemment, je me tenais armé de mes anciennes pensées.

Je me retournai, et je vis d’un côté une ombre dessinée par le soleil, et je reconnus par terre celle qui, si mon jugement ne se trompe point, était plus digne d’une existence immortelle.

Je disais en mon cœur : pourquoi trembles-tu ? Mais cette pensée n’était pas encore parvenue au fond de moi-même, que les rayons qui me consument étaient devant mes yeux.

De même que le coup de tonnerre se fait entendre au moment même où l’éclair brille, ainsi je fus surpris tout à la fois par l’apparition des beaux yeux brillants de Laure et par un doux salut.