Aller au contenu

Page:Petrone - Satyricon, trad. de langle, 1923.djvu/256

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Qu’avaient-ils besoin, répondit Lycas, de se raser comme des suppliants ? A moins que, peut-être, étant chauve on ne soit plus digne de compassion ? Mais à quoi bon perdre mon temps à chercher la vérité par intermédiaire. Qu’as-tu à dire, brigand ? Quelle salamandre[1] t’a fait tomber les sourcils ? A quel dieu as-tu voué ta chevelure ? Mais réponds-moi donc, poison ! »

CVIII. BATAILLE

Je me taisais, glacé par la crainte du supplice et, en présence de l’évidence, je ne trouvais rien à dire. Tout troublé et confus de ma laideur, il me semblait qu’avec mon crâne indécemment nu et mes sourcils aussi absents que les cheveux je ne pouvais rien faire et rien dire que de ridicule.

Mais quand on passa une éponge sur mon visage baigné de larmes et que l’encre délayée me couvrit toute la figure, confondant tous les traits tracés sur ma face en un même nuage de suie, ma colère se changea en fureur.

Cependant, Eumolpe déclare qu’il ne permettra à personne d’humilier, contre tout droit, deux hommes libres, et il repousse les menaces de nos persécuteurs non seulement de la voix mais du geste. Son valet lui prête main-forte, ainsi qu’un ou deux passagers, mais qui, dans leur faiblesse, nous apportaient plutôt un réconfort qu’une aide véritable dans cette querelle. Pour moi, dédaignant de me défendre, je menaçais de mes ongles les yeux de Tryphène, déclarant à haute et intelligible voix que j’allais faire usage de ma force si cette garce, qui seule sur

  1. Les anciens croyaient que le sang et la salive de cet animal avaient la propriété de faire tomber le poil.