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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/131

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vie ce qu’il en faut savoir avant de s’engager dans une voie d’où dépend quelquefois toute une destinée.

Je vous ai pardonné votre infidélité d’antan… Oh ! ne protestez pas : votre cœur était mien, je l’avais conquis ; et, par un orgueil puéril, vous l’avez porté à un autre — même cela je n’ai jamais voulu le croire — mais du moins, vous avez mis entre nous un obstacle qui semblait devoir séparer à jamais nos deux existences. Et vous en avez souffert ; moi aussi ! Ne recommençons pas, voulez-vous ?…

— Mais, fis-je, l’interrompant, très surprise, que voulez-vous dire ? L’obstacle dont vous parlez existe toujours…

— Oh ! si peu !

— Qu’importe ! Je ne suis pas libre. La situation n’est pas la même qu’autrefois et je n’ai plus à choisir entre deux destinées. Celle que j’ai acceptée s’impose à moi, à mon devoir…

Il haussa les épaules impatiemment.

— Si vous ne voulez pas m’entendre…

— C’est que je ne vous comprends pas.

— Voyons, Sylvère, ne faites pas poser un bonhomme comme moi, revenu de tout et de partout, et qui a l’horreur des mièvreries sentimentales, des petites hypocrisies féminines, ces joujoux enfantins des coquettes et des bourgeoises froides ou timorées. Ce vocabulaire est trop banal pour que votre grand esprit y puise ses moyens de défense, si tant est que vous songiez à vous défendre d’un amour que vous m’avez paru accueillir et, oserais-je le dire ? partager. Répondez-moi sincèrement, franchement, sans phrases : M’aimez-vous ?

— La question n’est pas de savoir si je vous aime, lui dis-je alors ; mais, en admettant que je réponde