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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/17

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Une soirée rue de Grenelle. Le directeur du grand journal austère, académique et conservateur, le Vieux Monde, reçoit tous les mardis. L’élite seule est admise. Des hommes graves, tous, même les plus jeunes, et presque tous décorés, sauf les éphèbes, et encore. Des femmes très décolletées et très prudes, la mine guindée et la conversation libre ; d’ailleurs entre deux âges. Beaucoup de diamants à monture ancienne ; les robes sont toutes de l’an dernier, même d’avant, somptueuses et conservées. Les coiffures aussi retardent. Très peu de maquillage, pas assez.

Deux salons communiquent par de larges baies qui encadrent une cheminée tout en glaces. Dans le premier, un immense piano à queue et des rangs de chaises. Dans l’autre, les fauteuils et les poufs et les dos-à-dos et les canapés, raides et moelleux, d’un style Empire très pur, mêlés de quelques modernités recouvertes d’étoffes chatoyantes. Beaucoup de plantes et beaucoup de fleurs. Un éclairage discret, brillant toutefois.

En ce salon se glissent ceux qui voudraient causer tout bas, car le murmure des voix s’élève à peine, encore interrompu par des « chut » que profère à tout instant, à l’entrée de l’une des baies, le maître de la