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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/225

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couchée sur l’épaule, tandis que leurs petits doigts s’écarquillent en l’air, dans une explication au milieu de laquelle elles s’embrouillent. Ces femmes-enfants et qui demeurent adorables d’ingénuité jusque sous leurs cornettes de grand’mères, sont d’autant plus dangereuses qu’elles n’ont aucune conscience de leur charme si subtil, disons même si pervers ; car l’amour-folie qu’elles inspirent s’adresse, en même temps qu’à leur féminine beauté, à la grâce attendrissante et si étrangement troublante de l’enfant qui est demeuré en elles… »

Te voilà portraiturée de la tête aux pieds, ma chère Sylvére ; et si tu te voyais en ce moment, tu mourrais de rire tant tu ressembles, toute pâlote encore et toute ébouriffée, avec tes cheveux dans le dos et ton peignoir froncé comme un sarrau, à une grande pensionnaire boudeuse.

— As-tu fini de dire des bêtises ? Il n’y a qu’une chose de vraie dans ton histoire, c’est mon épeurement et mon étonnement de la vie ; c’est la crédulité, sotte à mon âge, qui me rend la dupe de tous, et surtout mon incapacité de croire au mal ; c’est mon impuissance à me défendre et à me venger. Comme une enfant, en effet. Et c’est triste, pour une presque vieille femme sur qui pèsent tant de devoirs et tant de fardeaux.




Le train de Bretagne allait partir. Sur le quai, devant un compartiment déjà occupé par Janie, se tenaient groupés, très près les uns des autres, Sylvère, Paul et Louise. Émus, ils parlaient bas.

Sylvère, dans son long manteau gris, paraissait devenue tellement frêle qu’elle apitoyait. Sa belle appa-