Aller au contenu

Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/247

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Le baron Brelley ! Il est très bien, tu sais ? une distinction parfaite. Pourtant, je l’ai très rarement rencontré chez toi !

— Oh ! il est discret, prononça Louise un peu embarrassée.

— C’est égal, depuis le temps !…

Alors Mme de Bléry, très vite :

— Notre mariage ne se fera pas tout de suite, et je n’aime pas à être compromise. Songe qu’il nous faut attendre dix mois révolus !

— C’est vrai ! Et moi, combien encore ?

— As-tu des nouvelles de Maurine ?

— La dernière fois que je l’ai vu, il m’a paru affaibli. Oh ! connais-tu rien de plus atroce que cette attente d’une mort qui seule peut vous délivrer ? Je me fais peur, tant je me sens férocement cruelle. Quelquefois, lorsque je reçois un télégramme, avant de l’ouvrir, je me donne un affreux et exquis battement de cœur à me demander : si c’était lui qui ?… Et, pendant la durée d’une seconde, je savoure une joie épouvantable ; je me donne l’illusion de croire que c’est fini et que je vais crier vers Paul : enfin, enfin ! je suis à toi !

— Sylvère !… Tu l’aimes donc, Paul ! Je veux dire tu te sens donc entraînée vers lui, de tout ton être ?

— Tu veux savoir ?… Eh bien, oui, vois-tu, depuis des mois déjà, je suis presque au bout de mes forces… Je passe par de terribles crises, parfois ! Heureusement que je ne suis plus obsédée, pourchassée comme l’an passé ! Qu’arriverait-il ? Comme on est lâche ! comme toute volonté morale s’efface sous le vouloir impérieux d’une puissance physique inconsciente ! J’ai des heures où je me débats contre mes propres pensées, suggérées invinciblement par mes nerfs ; et