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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/318

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— Une mauvaise habitude que je leur ferai perdre.

— Non, va ! J’aime mieux te voir pleurer ! Il n’y a pas en toi l’étoffe d’une révoltée, ma pauvre chérie. Tu as beau dire, je te défie bien d’aller jusqu’au bout.

— Nous le verrons.

— Eh ! c’est tout vu ! Crois-tu que si tu étais capable de te donner à un homme, pour une raison quelconque, fût-ce par colère, tu te serais refusée si longtemps à celui que tu aimais !… Réfléchis donc. Ah ! plût à Dieu que cette crânerie te fût venue plus tôt et pour le bon motif ! Vous ne seriez pas aujourd’hui où vous en êtes, Paul et toi !

— Qui sait ? S’il m’avait réellement aimée, il m’aurait aimée encore, malgré mes refus. Pourquoi n’aurait-il pas attendu ? Le baron Brelley attend bien, lui, depuis cinq ans qu’il t’aime !

Mme de Bléry s’approcha de Sylvère, lui prit les mains et la secouant doucement :

— Regarde-moi donc, niaise, têtue. Regarde-moi. Tu ne comprends donc rien ? Je t’ai dit que nous nous aimions Octave et moi. Nous nous aimons depuis cinq ans, oui ; mais, depuis quatre ans, je suis à lui. L’aurais-je gardé, sans cela ? Certainement non. Tandis que, sûrs l’un de l’autre désormais, notre désir est devenu un besoin absolu de ne plus nous quitter. Et j’ai divorcé, et je l’épouse. Suis-je compromise ? Non. Ai-je perdu à ses yeux, aux miens, aux tiens, ma qualité d’honnête femme ? Non, je pense ! J’ai cédé aux nécessités de la vie, sans fausse pudeur, sans orgueil, simplement. Le résultat : nous sommes heureux. Et toi, toi !… tu pleures…

— Je crois, en effet, murmura Sylvère après avoir un peu rêvé, je crois que je me suis trompée… Et encore ! cela dépend comme on entend la vie. Que doit-