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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/71

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quieuse, l’aimable auteur des Belles Dames, et, lui serrant la main, sur le seuil, il lui dit :

— Vous pouvez compter, cher maître, sur toute ma bienveillance pour votre protégée ; mais, je vous le répète, j’ai mon comité de lecture, je ne décide pas seul, je me suis volontairement lié les mains afin de résister aux entraînements que, parfois, de belles personnes… Et puis, la Revue est très sévère, très fermée… Enfin, on verra. Au revoir !

. . . . . . . . . . . . . . .

Guy d’Harssay remontait, en compagnie de José de Meyrac, le boulevard Saint-Germain. Il habitait les Champs-Elysées, et José le Parc Monceau. Ce dernier renvoya son coupé pour accompagner le maître alerte, qui marchait volontiers près des tout jeunes gens, ceux-ci graves et un peu lourds, et qu’il entraînait de son pas souple, infatigable, avec comme un naïf orgueil de sa toujours triomphante jeunesse.

Plus haut de taille que Meyrac, il le dominait de sa belle tête dont le blond palissant et soyeux gagnait, par des boucles folles, la barbe éventaillée comme une gerbe de blés murs.

Plus noir en paraissait le jeune homme. Noirs, ses yeux grands et doux ; noirs les cheveux courts plaqués sur sa tête ronde et puissante ; noire la barbiche effilée et la moustache enroulée découvrant la bouche rouge et sensuelle. Le teint coloré, la raie du cou très blanche, révélant une peau fine au sang bleu, le corps rablé, assis : une force.

Guy d’Harssay continua :

— Tel fut le mariage de Sylvère ; une initiation brutale qui devait influer sur toute sa vie. Car si elle avait appris l’amour, si elle en avait connu les joies, elle ne serait certainement pas aujourd’hui farouche,