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Page:Peyrebrune - Victoire la rouge.djvu/126

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victoire la rouge.

et fumeuse qu’elle posait sur un coin de la table. Et, dans l’album de madame Maleyrac, elle cherchait le portrait du dragon. Il était là, campé sur une jambe, l’autre en avant, avec sa botte qui lui montait au genou, la taille fine, le buste bombé, la tête de côté comme pour affiler son regard qui était galant et moqueur avec une pointe de tendresse. Et son casque le haussait, tandis que la crinière noire qui pendait lui faisait comme une longue chevelure sur les épaules. Il était beau et charmant, et Victoire demeurait des heures parfois à soupirer devant lui, tout attendrie et se souvenant.

Le ventre énorme, la gorge débordante, malpropre et ébouriffée sous son fichu de couleur déteint, avec ses petits yeux doux et sa grosse bouche gourmande, elle eût été grotesque à soupirer devant le dragon beau et fin, n’étaient sa pâleur de mère et ses larmes de fille abandonnée.