Les merveilles de San-Francisco consistent en maisons d’habitation et de dépôt tout à fait ordinaires, que les mines d’or de la Californie ont donné et donnent chaque jour le moyen de faire construire. Ce qui m’étonna le plus dans cette ville de merveilles si riche et si luxueuse, c’est qu’on ne prenait aucun souci de deux choses très-importantes, l’entretien des chemins et l’éclairage.
On ne peut se faire une idée des trous, des montées et des inégalités des rues de la ville. Ici il faut gravir des marches, là il faut en descendre ; ici la chaussée est exhaussée, là elle est en contre-bas ; ici des places sont effondrées, là ce sont de véritables montagnes de briques, de bois, de chaux et de sable, et pas une lanterne n’avertit le passant. Cela rend les rues de la ville vraiment dangereuses, non-seulement pour les gens qui sont en voiture ou à cheval, mais même pour les piétons. Ce sont surtout les quais de bois qui sont dangereux. La mer arrive jusque sous les planches, et elles sont tellement pourries qu’elles se brisent quand où passe dessus. Le jour même, il faut marcher avec précaution, au risque de tomber dans les trous nombreux qui s’y trouvent. La nuit, il n’est pas rare que des piétons tombent à la mer et ne reparaissent plus.
On voit par terre, au milieu des rues les plus belles et les plus fréquentées, de vieux habits, des chiffons, des bottes, des bouteilles, des vases, des chiens crevés, des chats et des rats monstrueux qui fourmillent dans la ville ; on jette toutes les ordures devant la porte. Constantinople, comparé à San-Francisco, serait la ville de la propreté : là, au moins, il y a assez d’hommes et de chiens pour tenir la ville propre, les uns en ramassant les habits et les chiffons, les autres en mangeant les immondices.
À tout cela vient s’ajouter encore la licence que prend tout individu de faire et d’agir comme il veut. Il n’est pas rare que des charrettes s’arrêtent sur les passages étroits qui servent à traverser les rues, rendues impraticables par la