Page:Philippe - Marie Donadieu, 1904.djvu/19

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celui-ci ressemblait trait pour trait au valet de chambre de l’hôtel. Il y eut d’assez longs combats dans sa tête et il ne sut jamais s’il devait aimer l’enfant. Des deux autres filles, Jeanne, la dernière, n’avait que treize ans. Adrienne, sa sœur, était belle. Ses cheveux châtains, qu’elle séparait par le milieu, gonflaient à ses tempes et l’expression de son visage aboutissait à ses yeux d’où s’écoulait sans trêve un regard bleu, large, appuyé. À dix-huit ans, elle épousa du coup Félix Donadieu, contremaître à Lyon, dans une fabrique de soieries. Elle venait souvent les voir. Les premiers temps, il lui passait par la face un frisson, comme si elle présentait son cœur à l’élévation. Et puis la joie des familles casse, soudain le bonheur est déjà sec. Félix, un beau jour, découcha : il n’était que passionné ! Alors la vie commença. Elle accoucha d’une petite fille et la voua au blanc et au bleu. Félix s’échappait, suivait des pentes, roulait, carillonnait à toutes les fêtes. Il buvait avec extravagance, gesticulait, mais ne la battait pas. Il y eut des nuits où il se plaisait à promener sous les fenêtres de sa maison toute la