Page:Philippe - Marie Donadieu, 1904.djvu/192

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il ne savait quel fruit délicieux. Un peu plus tard, il se leva. Elle était couchée sur le dos, de tout son corps : on eût dit que sa vie aussi était couchée. Il s’approcha, baissa la tête, fut à la hauteur de la couverture et, se recueillant alors pour adorer ce qu’elle cachait, bienheureux à cause des voiles qui faisaient son baiser si pur, il posa ses deux lèvres sur le ventre d’une femme qu’un homme avait frappé. Elle fit :

— Et moi aussi, je suis contente d’avoir souffert.

Elle se rappela qu’elle n’avait pas menti. Jamais Raphaël ne l’avait battue, jamais Raphaël ne lui avait donné un coup de pied et pourtant elle n’avait pas menti. Elle se répétait à elle-même : « N’est-ce pas, je ne pouvais pas dire à ce petit tout ce que j’ai fait. Mais j’ai été bien malheureuse. Et puis, c’est en effet par mon ventre que j’ai souffert. » Et tout était bien vrai. C’était comme une vérité par substitution.

Il y eut un silence singulier qui garnit toute la chambre, qui gagna chacun de leurs mouvements, un silence plus fort que le bruit de