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APOLLONIUS ET LE PRÊTRE D’ESCULAPE.

« Est-il vrai que les dieux soient justes ? — Ils sont toute justice, répondit le prêtre. — Sont-ils prudents ? — Peut-il y avoir, une prudence supérieure à celle de la divinité ? — Connaissent-ils ou ignorent-ils les affaires des hommes ? — Le principal avantage que les dieux ont sur les hommes est que ceux-ci, vu la faiblesse de leur entendement, ne connaissent pas même ce qui les concerne, tandis que les dieux connaissent et les choses divines et les choses humaines. — Bien dit et parfaitement vrai ! Mais, ô prêtre, puisque les dieux savent tout, il me semble qu’un homme qui aborde un sanctuaire avec une bonne conscience doit faire cette prière : « Ô dieux, donnez-moi ce qui m’est dû. » Or, si les hommes pieux ont droit à quelque bien, il n’est dû que du mal aux méchants. Et les dieux ont raison, quand ils trouvent un homme sain et pur de crime, de le renvoyer couvert, non pas de couronnes d’or, mais de biens de toute espèce ; quand ils voient un homme tout flétri et tout gâté par le vice, de le livrer au châtiment, et d’appesantir d’autant plus sur lui leur colère, qu’il a fait preuve de plus d’audace en portant aux autels un cœur impur. » Puis, se tournant vers Esculape : « Ô Esculape, s’écria-t-il, je reconnais la sagesse profonde qui vous est propre, quand je vous vois défendre aux méchants de vous approcher, alors même qu’ils apporteraient ici tous les trésors de Sarde et de l’Inde : car, s’ils font ainsi des sacrifices et des offrandes, ce n’est pas pour honorer les dieux, c’est pour se racheter des châtiments qui leur sont dus ; et votre suprême équité vous empêche de leur en faire grâce. » Apollonius était encore dans l’adolescence lorsqu’il tenait ces sages discours et d’autres semblables.

XII. Voici encore un trait qui se rapporte à son séjour à Egées. Le gouverneur de Cilicie était un homme sans mœurs