Page:Philostrate - Apollonius de Tyane, sa vie, ses voyages, ses prodiges, 1862.djvu/73

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ner, lui dit : « Tout cela, ô roi ! pour vous ce sont des richesses, mais pour moi c’est de la paille. — Que dois-je faire, demanda le roi, pour en faire un bon usage ? —Les employer, car vous êtes roi. »

XL. Apollonius tint encore devant le roi plusieurs discours du même genre ; puis, le voyant disposé à suivre ses préceptes, et ayant tiré de ses entretiens avec les mages tout ce qu’il en pouvait attendre, il dit à Damis : « Allons, partons pour l’Inde. Les voyageurs qui abordaient chez les Lotophages{{lié}[1], après avoir goûté du lotos, oubliaient leur patrie : et nous, bien que cette terre ne produise rien de semblable, nous nous y arrêtons plus longtemps qu’il ne faut et qu’il n’est convenable. — Je suis tout à fait de votre avis, dit Damis ; mais j’attendais que le temps fixé par le présage de la lionne fût accompli. Or il ne l’est pas encore, car il n’y a qu’un an et quatre mois que nous sommes ici. Si nous partions maintenant, n’aurions-nous pas à nous en repentir ? — Soyez tranquille, le roi ne nous laissera pas partir avant que le huitième mois soit écoulé : vous voyez comme il est bon, comme il mériterait mieux que de régner sur des Barbares ! »

XLI. Lorsqu’enfin Apollonius eut pris la résolution de partir, et que le roi lui eût donné son congé, il se ressouvint qu’il avait différé les grâces royales jusqu’au jour où il aurait des amis, et il lui dit : « Ô le meilleur des rois ! je n’ai rien fait pour mon hôte, et je dois une récompense aux mages ; je vous prie d’acquitter envers eux la dette de ma reconnaissance : ce sont des hommes savants, et qui vous sont entièrement dévoués. » Le roi, transporté de joie, lui répondit : « Je vous les ferai voir demain, magnifiquement récompensés et capables d’inspirer l’envie.

  1. Allusion à un épisode de l’Odyssée (liv. IX, v. 84 et suiv.)