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Et qu’on ne croie pas que je vienne demander une grâce qu’on m’accorde jamais à ceux qui en ont besoin ; il ne s’agit que d’une simple explication.

Je devrais écrire à merveille, car Voltaire, Jean-Jacques, Fénelon, Buffon, et plus tard Cochin et d’Aguesseau, ont été mes auteurs favoris ; je les sais par cœur.

Mais peut-être les dieux en ont-ils ordonné autrement ; et s’il est ainsi, voici la cause de la volonté des dieux :

Je connais, plus ou moins bien, cinq langues vivantes, ce qui m’a fait un répertoire immense de mots de toutes livrées.

Quand j’ai besoin d’une expression, et que je ne la trouve pas dans la case française, je prends dans la case voisine, et de là, pour le lecteur, la nécessité de me traduire ou de me deviner : c’est son destin.

Je pourrais bien faire autrement, mais j’en suis empêché par un esprit de système auquel je tiens d’une manière invincible.

Je suis intimement persuadé que la langue française, dont je me sers, est comparativement pauvre. Que faire en cet état ? Emprunter ou voler.

Je fais l’un et l’autre, parce que ces emprunts ne sont pas sujets à restitution, et que le vol de mots n’est pas puni par le code pénal.

On aura une idée de mon audace quand on saura que j’appelle volante (de l’espagnol) tout homme que j’envoie faire une commission, et que j’étais déterminé à franciser le verbe anglais to sip, qui signifie boire à