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SABBAT

mes, aussi, et surtout, de beaux salauds. Mais tu ne peux savoir ce que j’entends par cette épithète expressive. Je la donne au solitaire qui dort, la joue sur sa guitare, au rêveur qui pâlit parce que le cabaret a posé, derrière les vitres sales, sa face caressante et douloureuse, à l’innocent qui pense à toutes les curiosités des serpents et des Ève, des lampes et des Psyché, des coquillages qui se groupent, toujours, au fond de la mer, pour surprendre la mer, et que la mer, toujours, disperse…

— Pourquoi l’innocent est-il si troublé ?

— Parce qu’un petit insecte noir poind du cœur jaune de la reine des prés…

Ah ! beau salaud, ma foi, le bienheureux maudit pour qui tout est transposition démesurée, résistance et frisson, contradiction et jouissance, amour coupable et défendu, délectation pleine de larmes, rapprochement étrange, renversement profanateur, interprétation savante, ambiguë et pensive ou proposition plus ingénue que le rire d’un enfant !

Bémolus, comment t’expliquer ? Il y a une certaine salivation de l’esprit qui ne peut être que démoniaque. Les poètes la connaissent particulièrement. Sombre, enchanteresse volupté que nous éprouvons quand l’œil oblique se pose sur nous ! Oui… l’hymne au Créateur… Mais l’accent de la couleur rouge prisonnière, en robe de rubis, dans la crypte que nous connaissons tous ?

Pas de démonisme : pas de Poésie. Si, du