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SABBAT

— Pourquoi sifflez-vous en me regardant ?

— Parce que je suis le potier, que je pétris l’argile et que je façonne le vase, malgré tout, car c’est mon métier et ma gloire.

— Pourquoi ne dites-vous plus rien ?

— Parce que je suis le tisserand, que je carde le lin et que je tisse la toile, malgré tout, car c’est mon métier et ma vocation.

— De grâce…

— Connaissez-vous la haine que le cavalier a pour le cheval qui ne se laisse pas monter, cette haine amoureuse qui veut étreindre les flancs de la bête rétive et qui la cingle pour son refus ?

— Je vous supplie…

— Connaissez-vous la haine que la mère a pour l’enfant qui dit non, cette haine amoureuse qui demande le oui et qui sévit jusqu’à ce qu’elle l’obtienne ?

— Oh ! laissez-moi. C’est trop…

— Connaissez-vous la haine que la lime a pour le diamant, le marteau pour le clou, l’abeille pour la rose, cette haine amoureuse qui recherche la perfection, poursuit sa fin, exige sa nourriture ?

— Que voulez-vous décidément ?

— Vous faire tout le mal, ô ma chère âme, tout le mal qu’il faudra puisque tout mon bien est en vous. Je vous mettrai sens dessus dessous, comme un voleur une maison, jusqu’à ce que j’aie trouvé le trésor que je