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SABBAT

signent, en retour, de fabuleux assignats : les Indulgences, ces gredins délicieux, et je ne sais ce qui me stupéfait le plus : ou l’humble tronc d’Antoine — ce gagne-petit — ou le cœur rutilant de Judes qui, en sa qualité de beau garçon, arrache — ce rastaquouère bouclé — émeraudes et rubis aux aventurières de la dévotion.

Cependant, j’avoue que ces démonstrations affreuses ou ces idolâtries intéressées ne m’empêchaient pas de me pâmer devant l’anguleuse douceur des Philomène et des Roses de Lima, de faire, du plâtre de leur innocence, ma communion enfantine, de me jeter, dans la fournaise des topazes béatifiques envahies par le soleil levant, avec un cœur ravagé d’or et de folie, de m’absorber dans l’adoration d’un de ces reliquaires qui tiennent de l’apothéose et de la damnation et autour desquels sont cristallisés, en joyaux insolents, la sueur et l’effroi des esclaves chrétiens, de chérir la blanche Vierge à l’heure étoilée des litanies… Mais était-ce là de la piété ? Et quand je frémissais d’un étrange et prodigieux sadisme en contemplant l’éternité des saints en robe pourpre, les saintes armées de la quenouille ou parées trop fémininement de la colombe, les roses affamées de perfection avec une lèvre boudeuse de vierges tentées, les pavots qui, décidés à ne pas passer par le purgatoire, ont solennellement renoncé, le scapulaire au cou, aux voluptés de la vallée de larmes, les boutons d’or pénitents