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Page:Piedagnel - Jules Janin, 1877.djvu/71

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jules janin
la grâce et du charme ; vingt ans après elle saisit le premier prétexte à revenir au théâtre, elle y revient, à peine la veut-on reconnaître, et, l’infortunée ! elle est morte à la peine. Elle vivrait heureuse, honorée et forte, si elle avait chanté tant qu’ont duré ses beaux jours. La belle affaire, après tout, de se reposer à trente ans !
C’est pourquoi je vous loue et je vous aime de revenir, si vite et si bien, prendre terre à Paris ! Qu’importe le jour de cette fête ? On vous verra, vous serez applaudie, et vous aurez prouvé, une fois encore, que le grand artiste est supérieur même au chagrin le plus légitime. Hélas ! pendant que vous quittez Bruxelles, je quitte Paris ; à peine si nous pourrons nous saluer en passant ; une poignée de main, comme c’est peu, quand on est de si grands amis que nous, quand chaque jour a serré les liens, agrandi l’estime et justifié la tendresse. Heureusement que Spa est une ville amie et propice : on s’y trouve, on s’y dit bonjour à la face du ciel ; on s’y câline, on s’y dorlote, on s’y repose. Et que je serai donc content de vous y rencontrer, mon enfant bien-aimé ! Je ne sais pas tout à fait le jour de notre départ. J’ai bien à écrire encore, avant ce jour heureux.
Je vous embrasse de tout mon cœur.
J. Janin.

Le 10 août 1841, M. Constant Janin, étudiant en philosophie au grand séminaire