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CHEZ LES TRIBUS INDIENNES

leur affliction. Elles amenaient au milieu du camp tous les chevaux qu’elles possédaient. Un des chefs sauta sur l’un de ces coursiers, et levant son casse-tête en l’air, s’écria qu’il était prêt à aller tirer vengeance du guet-apens. Aussitôt une foule de jeunes gens se rangèrent à ses côtés ; tous ensemble entonnèrent le refrain guerrier ; et promettant solennellement qu’ils ne retourneraient pas les mains vides, c’est-à-dire sans chevelures, ils se mirent en route le même jour. Dans ces occasions de deuil, les proches parents distribuent aux guerriers tout ce qu’ils possèdent, ne retenant que des haillons pour se couvrir. Le deuil cesse lorsque la vengeance est obtenue. Les guerriers, à leur retour, placent aux pieds des veuves et des orphelins les trophées remportés sur l’ennemi ; leurs amis viennent les féliciter et leur offrir des présents. Alors passant du deuil à l’exaltation, ils jettent les haillons, se lavent, se barbouillent de couleurs, s’habillent de leur mieux, attachent au bout de perches les chevelures conquises, et font le tour du camp, chantant, dansant et entraînant à leur suite tout le village.

Le 25, je fis mes adieux à mes dix compagnons Têtes-plates et aux Corbeaux ; et je m’aventurai une seconde fois dans les plaines arides de la Roche-jaune, accompagné du fidèle Iroquois Ignace, d’un métis Cree, nommé Gabriel, et de deux braves Américains, qui, bien que protestants, voulurent servir de guides à un pauvre mission-